Une société peut-elle prêter de l’argent à ses actionnaires ?


 

Le code monétaire et financier est assez précis sur la possibilité de financer des opérations de crédit à titre habituel. Conformément aux dispositions de l’article L.511-5, ce dernier indique qu’ « il est interdit à toute personne autre qu’un établissement de crédit ou à une société de financement d’effectuer des opérations de crédit à titre habituel ». 

Toutefois, le paragraphe I, alinéa 3 de ce même article précise : « Les interdictions définies à l'article L. 511-5 ne font pas obstacle à ce qu'une entreprise, quelle que soit sa nature, puisse : [...] Procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l'une des entreprises liées un pouvoir de contrôle effectif sur les autres ».

Nous allons découvrir que les dispositions sont différentes si la société souhaite prêter de l’argent à un associé ou actionnaire selon qu’il soit une  personne physique ou une personne morale. 

L’interdiction pour une société de prêter de l'argent à un associé (personne physique)

 

Au sein d’une société anonyme, il est interdit pour les administrateurs, le directeur général, les directeurs délégués et les représentants permanents des personnes morales administrateurs, de posséder des comptes courants d’associé débiteur.

En effet, l’article L. 225-43 du code de commerce énonce : 

« A peine de nullité du contrat, il est interdit aux administrateurs autres que les personnes morales de contracter, sous quelque forme que ce soit, des emprunts auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert, en compte courant ou autrement, ainsi que de faire cautionner ou avaliser par elle leurs engagements envers les tiers.

Toutefois, si la société exploite un établissement bancaire ou financier, cette interdiction ne s'applique pas aux opérations courantes de ce commerce conclues à des conditions normales.

La même interdiction s'applique au directeur général, aux directeurs généraux délégués et aux représentants permanents des personnes morales administrateurs. Elle s'applique également aux conjoint, ascendants et descendants des personnes visées au présent article ainsi qu'à toute personne interposée. » 

Par ailleurs, l’article L. 227-12 du code de commerce, relatif aux sociétés par actions simplifiées, précise que l’ensemble des interdictions susvisées aux termes de l’article L. 225-43 du code de commerce s’appliquent, dans les conditions déterminées par cet article, au président et dirigeants de la société. 

En outre, la même interdiction est énoncée pour les sociétés à responsabilité limitée. 

 

Ainsi, en principe, une société est dans l’impossibilité de consentir un prêt à l’un de ses associés ou actionnaires personnes physiques. Néanmoins, il n’est pas totalement impossible pour une société de consentir un prêt à l’un de ses associés lorsque ce dernier est une personne morale.

Les prêts consentis par une société à ses associés personnes morales

Comme énoncé ci-dessus, l’interdiction faite aux sociétés d’effectuer un prêt à leurs associés ou actionnaires personnes physiques est totale. 

Cependant, le code de commerce réserve expressément les découverts octroyés par la société au profit des personnes morales associées ou gérantes de la société à responsabilité limitée (C. com, art L.223-21), ainsi que des personnes morales dirigeantes de sociétés anonymes (C.com, art L. 225-43 et L. 225-91). 

La règle s’étend par renvoi aux personnes morales qui dirigent des sociétés en commandite par actions ou des sociétés par actions simplifiées (C. com, art L. 226-10 et L. 227-12). 

Les dispositions des articles susvisés permettent d’effectuer des prêts entre des sociétés d’un même groupe pouvant notamment au moyen de compte courant d’associé. 

En revanche, les associés bénéficiaires des prêts se doivent de respecter les procédures de contrôle imposées aux comptes créditeurs, lorsque les conditions en sont réunies. 

 

Une entreprise peut octroyer un prêt à une autre entreprise, même si elle n’est pas liée juridiquement à cette dernière. En revanche, il est nécessaire de caractériser un lien économique entre les deux entités, tel qu’une une relation client/fournisseur, par exemple. 

Par ailleurs, le prêt doit être accordé à court terme sur une limite maximum de deux ans et concerne essentiellement des prêts de trésorerie. 

Enfin, le prêt inter-entreprise introduit par la loi Macron du 6 août 2015 ne doit pas avoir pour effet d’imposer un délai de paiement inférieur aux plafonds légaux, conformément aux dispositions des articles L.441-6 et L.443-1 du code de commerce.

Les conditions à respecter par l’entreprise prêteuse

  • A la date de clôture de chacun des deux exercices comptables précédant la date d’octroi du prêt, les capitaux propres de l’entreprise prêteuse sont supérieurs au montant de son capital social et son excédent brut d’exploitation est positif. 

  • La trésorerie nette définie comme la valeur des actifs financiers courants à moins d’un an, minorée de la valeur des dettes financières courantes à moins d’un an, constatée à la date de clôture de chacun des deux exercices comptables de l’entreprise prêteuse précédent la date d’octroi du prêt est positive. 

  • Le montant en principal de l’ensemble des prêts qu’une même entreprise peut accorder à d’autres entités au cours d’un exercice comptable ne peut pas être supérieur à un plafond égal au plus petit des deux montants suivants :

       - 50% de la trésorerie nette ou 10% de ce montant calculé sur une base consolidée au niveau du groupe de sociétés auquel appartient l’entreprise prêteuse ;

         -10 millions d’euros, 50 millions d’euros ou 100 millions d’euros pour les prêts accordés respectivement par une petite ou moyenne entreprise, une entreprise de taille intermédiaire, ou une grande entreprise. 

Enfin, le commissaire aux comptes de l’entreprise prêteuse est avisé annuellement des contrats de prêts en cours consentis en vertu de l’article L. 511-6, 3 bis du code monétaire et financier. 

En effet, ce dernier doit attester, pour chaque contrat, du montant initial et du capital restant dû de ces contrats de prêts ainsi que du respect des dispositions qui les régissent, au sein d’une déclaration jointe au rapport de gestion. 


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